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Dans cette série de 3 articles, nous tenterons de démystifier la réaction d’Herxheimer afin de comprendre les processus de guérison propres à la maladie de Lyme et d’élaborer des stratégies éprouvées afin de minimiser les souffrances engendrées par ces crises malheureusement inévitables.
Mais pour assimiler le concept de la réaction d’Herxheimer, il nous faut d’abord examiner et comprendre l’origine des symptômes vécus au quotidien par les personnes atteintes de la maladie de Lyme (ML).
L’ORIGINE DES SYMPTÔMES DE LA ML
Parlons INFECTION : le cas classique de la grippe
Pensez à ce qui se passe quand vous attrapez la grippe : Vous avez des courbatures, des frissons, de la fièvre, des nausées, un manque d'appétit, de la fatigue, de la léthargie. À ceci s’ajoute parfois d’autres symptômes moins communs. Ce que vous ne savez peut-être pas, c’est que ces symptômes de la grippe ne sont pas uniquement causés par la présence d'un virus dans le corps.
Ces symptômes désagréables de l'inflammation sont toutefois indispensables pour venir à bout de la grippe. Les frissons nous signalent de nous emmitoufler et de chercher une source de chaleur. Et ces petits mouvements de tremblements caractéristiques des frissons sont un moyen efficace d’augmenter la température du corps. Après un certain temps, la température corporelle atteint un point que l’on nomme « fièvre », dont le rôle est d’activer le système immunitaire. Elle déclenche une cascade de mécanismes immunitaires nécessaires à la lutte contre l'infection. Le manque d'appétit signifie que notre corps n’a pas assez d'énergie pour digérer et traiter les nutriments ingérés, parce que toute l'énergie disponible est canalisée pour combattre l'infection. Les douleurs musculaires, les courbatures et l'inflammation témoignent que notre système immunitaire répond à l'infection, et donc, que notre corps riposte avec vigueur. L’absence de ces symptômes signifierait au contraire que le corps n’est pas en train de combattre l’infection de façon efficace, et conséquemment, que nos chances de nous débarrasser de cette simple grippe sont compromises.
Comme la grippe, la maladie de Lyme EST une INFECTION
Même si dans le cas de la ML, l’infection n’est pas causée par un virus mais plutôt par une bactérie, il n’en demeure pas moins que le principe reste le même. Ainsi, la présence de spirochètes dans le sang et dans nos tissus n’est pas responsable de la majorité des symptômes que nous vivons. Comme pour la grippe, la plupart des symptômes résultent des efforts que le corps déploie pour combattre l'infection. Aussi souffrants et handicapants soient-ils, ils indiquent généralement que notre corps réagit et lutte.
La maladie de Lyme : une infection pas comme les autres
Par ailleurs, dans le cas particulier de la ML, on remarque que les symptômes empirent puis s’estompent de façon cyclique, avec parfois quelques périodes de complète accalmie (qui peuvent même durer quelques années). Parmi les membres inscrits sur les forums de discussion de Lyme, il n’est pas rare de retrouver des personnes atteintes qui sont capables de se promener, d’aller au cinéma, et même de travailler à temps plein ou temps partiel – tout ça alors que leur corps couve une infection autrement plus violente et dangereuse qu’une grippe. La grippe implique des symptômes intenses et continus tout le long de l’infection, alors que c’est rarement le cas avec la ML. Souvent, les personnes atteintes de la ML sont incapables de déclencher une fièvre digne de ce nom. Considérant le fait que la fièvre est le mécanisme le plus important de l'organisme dans sa lutte contre l'infection, cette observation est particulièrement préoccupante.
Cette conclusion est compréhensible puisque dans la plupart des maladies, une absence ou régression de symptômes indiquent généralement que vous êtes sur la voie du rétablissement. Mais dans le cas de la ML, l’absence de symptômes indique plutôt que l'infection est en train de gagner du terrain, et non pas qu’elle a été éradiquée! Rappelez-vous : pas de symptômes = pas de lutte. L'infection a donc libre cours puisque le système immunitaire ne fait pas son travail.
Borrelia joue à « cache-cache » avec le système immunitaire
Mais alors, pourquoi le système immunitaire est-il capable de combattre un virus commun tel que la grippe mais pas la ML?
La capacité qu’a le système immunitaire d’identifier les envahisseurs étrangers - pour ensuite les éliminer - est ici désactivée grâce à des mécanismes d’évasion très sophistiqués élaborés par la bactérie. C’est comme si l’infection s’adaptait au système immunitaire de son hôte et l’apprivoisait pour mieux le berner.
Plusieurs travaux de recherche ont permis d’identifier les nombreuses stratégies spécifiques qui sont utilisées par les bactéries de la ML afin d’accomplir ce « prodige ».
Plusieurs travaux de recherche ont permis d’identifier les nombreuses stratégies spécifiques qui sont utilisées par les bactéries de la ML afin d’accomplir ce « prodige ».
On parle ici d’un code protéique bien précis qui fait office d’empreinte digitale, si on veut. Non seulement peut-il cacher ce code, mais il peut aussi choisir de le modifier temporairement juste assez longtemps pour pouvoir passer inaperçu pendant que le système immunitaire procède à des « inspections de reconnaissance ». Ce phénomène est appelé « antigen-shifting ». Plusieurs autres méthodes d'évasion du système immunitaire élaborées par Borrelia Burgdorferi ont été découvertes au cours des dernières années et les recherches se poursuivent (il s’agit de fouiller le web pour les trouver).
En tout cas, une chose est certaine : le virus de la grippe ne peut pas élaborer ce genre de stratégies. Sans cachette ni « déguisement », il est rapidement repéré par le système immunitaire et complètement éliminé, alors que les spirochètes peuvent proliférer et croître gaiement pendant des années sans jamais alerter le système immunitaire. Ainsi dissimulée, l’infection devient chronique et s’étend de tissus en tissus (grâce notamment à ses vrilles qui lui permettent de perforer les membranes protectrices des organes pour y pénétrer en profondeur) sans trop perdre d’effectifs pendant ses croisades.
Une autre arme à son actif : la redoutable neurotoxine
Malgré le fait que ces bactéries soient capables de persister dans le corps sans susciter de controverses (haha! Quelle belle et ironique métaphore!! Excusez-là…), la personne atteinte éprouve tout de même des symptômes de maladie. Les victimes de la ML chronique, bien qu’ils ne paraissent souvent pas aussi gravement malades que les gens atteints de la grippe, sont pourtant très souffrantes. Dans son processus de fuite, le spirochète responsable de la ML sécrète une redoutable neurotoxine qui est responsable de l’altération de nombreuses fonctions du corps et peut entraîner notamment : la surcharge du foie, de la léthargie et de la fatigue, des douleurs musculaires, de la confusion mentale, de l'instabilité émotionnelle, un dysfonctionnement de l'hypothalamus (lequel peut éventuellement affecter la thyroïde, les glandes surrénales et d'autres hormones), et bien plus encore.
Quand la perspicacité nous rend malades
En outre, parce que l'évasion des spirochètes n’atteint pas un taux de réussite de 100%, le système immunitaire peut parfois "entrevoir" l'infection, ce qui entraîne des symptômes d'inflammation et l'activation du système immunitaire. Une personne pourra donc éprouver des frissons, des maux de tête, des maux de gorge, des nausées, de la fatigue, des douleurs musculaires, un élargissement de la rate, des extrémités froides, etc. Les symptômes les plus notables surviennent généralement au niveau du cerveau (encéphalopathie et/ou méningite) où l’inflammation se manifestera par des symptômes souvent angoissants comme de la confusion, de la dépression, des inquiétantes et sournoises "rages de Lyme", des pertes de mémoire, etc.
Sur la base de ces informations, nous pouvons établir que les deux principales causes des symptômes de la ML sont la mise-en-circulation d’une neurotoxine (qui persiste malgré l’évasion immunitaire de la bactérie) et l'inflammation (qui diminue à mesure que l'infection s’adapte au système immunitaire de son hôte et parvienne à se dissimuler).
Ne manquez pas le prochain article où nous décortiquerons
la fameuse - et non moins redoutée -
réaction d’Herxheimer !
Crédits photos :
- « Pain Map » de vaXzine; https://www.flickr.com/photos/vaxzine/2642346629/in/photolist-52uHAv
- « It’s a man flu » de Tomas : https://www.flickr.com/photos/sunnyuk/4022711612/in/photolist-78ts1L
- « Fingerprint » de CPOA : https://www.flickr.com/photos/93243105@N03/8477734222/in/photolist-dV9B2q
- « The Detective » de paurian : https://www.flickr.com/photos/paurian/3550755709/in/photolist-6pLxY2-9FUV8h